ACCIDENT DE LA CIRCULATION/ ACCIDENT DE LA ROUTE – CHUTE D’UN ENFANT SUR UNE VOIE DE TRAMWAY

18/01/2024
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Dans un arrêt rendu par la 2ème chambre civile de la Cour de cassation et publié à son bulletin (n° du pourvoi en cassation 21-25.352), la haute Cour rappelle que la Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisations, s’appliquant à la plupart des accidents dits de la route, peut s’appliquer également à un accident survenu avec un tramway.

En effet, dès lors que la voie de circulation est partagée entre le tramway et les autres usagers de la route, la loi sur les accidents de la circulation / accidents de la route doit s’appliquer.

La difficulté étant bien sûr de délimiter l’endroit à où les tramways et les véhicules partagent les voies de circulation et le moment où ils ne les partagent pas….

En l’espèce, les juges ont retenu que la loi doit trouver application à l’accident lorsqu’à l’endroit du choc aucune barrière ne sépare la voie de tramway du trottoir duquel la victime a chuté et que la hauteur de celui-ci ne permet pas de délimiter cette voie.

En juin 2011 un adolescent de 15 ans, chahutant avec trois camarades, fait un écart du trottoir longeant la voie du tramway sur lequel il se trouvait et tombe sur la voie au moment de son passage.

Ses père et mère assignent l’exploitant du tramway et son assureur ; ces derniers appellent en la cause les parents des autres mineurs et en garantie leurs assureurs respectifs.

La Cour d’Appel de Bordeaux estiment que les faits sont bien constitutifs d’un accident de la circulation et que dès lors les dispositions de la loi du 5 juillet 85 doivent trouver application ; ainsi la victime étant piéton et du fait de son jeune âge aucune faute ne peut lui être reprochée qui serait susceptible de limiter son droit à indemnisation, pas même la fameuse FICEA (faute inexcusable cause exclusive de l’accident).

L’indemnisation en réparation de ses préjudices corporels est fixée à 240.618,75 € ; l’indemnisation de sa mère au titre de son préjudice d’affection est fixée à 5.000,00 € (le père étant entre temps décédé, aucune indemnisation n’est accordée).

La société exploitante du tramway et son assureur forme un pourvoi en cassation au motif que conformément à l’article 1 de la loi Badinter (autre nom de la loi du 5 juillet 1985 sur les accidents de la circulation / accidents de la route) précise que ladite loi ne peut s’appliquer lorsque un tramway circule sur une voie qui lui est propre c’est-à-dire non partagée avec d’autres véhicules terrestres à moteur.

La 2ème chambre civile de la Cour de Cassation approuve la Cour d’Appel au motif qu’elle a relevé que « la chaussée, qui est divisée en trois voies, sans marquage au sol, dont deux voies ferrées contiguës empruntées par le tramway, non surélevées, et une voie à sens unique pour les autres véhicules, est longée de part et d’autre par un trottoir bordé de plots alternant avec des barrières. [Or] à l’endroit du choc, aucune barrière ne sépare la voie de tramway du trottoir duquel la victime a chuté et […] la hauteur de celui-ci ne permet pas de délimiter cette voie ». La Cour de Cassation approuve les juges du fond d’avoir ainsi considéré qu’à l’endroit du choc, la voie du tramway n’était pas isolée du trottoir et ne lui était donc pas propre.

L’enjeu était de taille puisqu’à défaut d’application de la loi sur les accidents de la circulation / accidents de la route, très favorable à l’indemnisation des victimes, une faute aurait pu être reprochée à l’adolescent et par voie de conséquent entraîner un limitation de l’indemnisation de ses dommages corporels.